Encore fermés, les cinémas oscillent entre colère et résignation

15 décembre 2020 à 6h30 par Etienne Escuer

VIBRATION
Les salles de cinéma ne peuvent pas encore rouvrir.
Crédit : Pixabay - photo d'illustration

Initialement prévue ce mardi 15 décembre, la réouverture des lieux culturels n'aura pas lieu.

« Une grosse douche froide » : Laurent Barriquault, le directeur du cinéma CGR Saint-Saturnin, dans la Sarthe, ne s’attendait pas à ce que le gouvernement annonce la semaine dernière la non-réouverture des lieux culturels. « J’avais juste imaginé que potentiellement le gouvernement pouvait décaler d’une semaine la réouverture de salles de cinéma, parce qu’on ne pouvait pas enlever ça aux Français à Noël », explique-t-il. « Quand on discute avec nos clients, ils ont envie de bouger, sortir, aller au cinéma, au théâtre, etc. » Aussi parle-t-il d’une décision « extrêmement violente », qui lui a fait ressentir « colère puis résignation parce que de toute façon, je n’ai pas la main sur notre quotidien ».

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Un protocole sanitaire strict était mis en place

La décision a été d’autant plus difficile a accueillir que le secteur du cinéma avait fait de gros efforts pour mettre en place un protocole sanitaire strict : port du masque, portes extérieures ouvertes, jauge réduite, sièges vides entre spectateurs, sens de circulation, gel hydroalcoolique, salles aérées régulièrement, paiement à distance, etc. « De nombreux médecins avaient fait l’éloge du protocole sanitaire des cinémas », confie Laurent Barriquault. « Aucun foyer de contamination n’a été détecté dans un cinéma, tout se passait très bien et les gens se sentaient rassurés. »

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Le public était d’ailleurs revenu dans les salles obscures cet été et à l’automne, malgré une programmation assez timide. Parmi les blockbusters, seule la sortie de Tenet, de Christopher Nolan, avait été maintenue fin août. « Nous avons fait de bons scores, mais une programmation qui n’était pas très riche aux yeux de certains clients. J’étais super optimiste et super confiant pour cette fin d’année », explique Laurent Barriquault. Si quelques reports (James Bond, Les Tuche, etc.) ont été décidés, Wonder Woman 1984 aurait cependant ramené du monde dans les salles. Quant au couvre-feu, s’il aurait impacté la fréquentation puisque 40% des entrées se font après 20h, « on se serait adaptés », confie le directeur du cinéma sarthois. « Si le spectateur a vraiment envie d’aller au cinéma, il décale sa séance. Tout était prêt pour que nous réalisions des vacances de Noël de bonne facture. »

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La concurrence des plateformes de streaming

Si la non-réouverture fait grimacer les cinémas, les plateformes de streaming se frottent de leur côté les mains. Certains films, à l’image de Mulan, sont sortis en effet directement sur des plateformes, sans passer par la case cinéma. De quoi bouleverser durablement le secteur ? « J’ai un côté pessimiste qui me fait dire que d’un côté, l’expérience qu’offre la salle de cinéma va disparaître. Avec ces plateformes, c’est facile, on s’installe dans son canapé et on a accès à tout », confie Laurent Barriquault. « Mais en même temps, la salle de cinéma a quelque chose de magique, cette transmission du père qui offre à son fils une séance autour d’un dessin animé ou d’un film d’action par exemple. J’ai du mal à imaginer que la plateforme offre une telle expérience même si le niveau d’équipement individuel ne cesse d’augmenter. »

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Le directeur du cinéma sarthois a-t-il tout de même le moral ? « Je reste optimiste, je reste confiant. Les gens ont besoin de divertissement. La question, c’est quand ? », explique-t-il. « Ce n’est pas comment ou avec quels films, mais bien quand. Je suis assez positif pour imaginer que tout va rentrer dans l’ordre. »

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Les différentes organisations attendent désormais le 7 janvier prochain, date fixée par le gouvernement pour évoquer une éventuelle réouverture. Mais plusieurs ont d'ores et déjà prévu, en attendant, de saisir le Conseil d’Etat pour contester leur fermeture.