« Ce qui est très intéressant chez un vrai méchant, c’est qu’on finit toujours par l’aimer »

21 mars 2024 à 6h00 par Hugo Harnois

Le Joker, interprété par Heath Ledger dans The Dark Knight, de Christophe Nolan
Le Joker, interprété par Heath Ledger dans The Dark Knight, de Christophe Nolan
Crédit : Warner Bros

Déjà à l’origine de la chaîne YouTube « Va te faire Suivre » suivie par plus de 40.000 abonnés, Jérémy Gallen vient de sortir un nouveau livre « La Psychologie des Méchants ».

Essayez d’imaginer Hannibal Lecter, le Joker, ou encore Dark Vador allongé sur le divan d’un psychologue, en train de se faire analyser. Cette idée un peu folle, c’est celle de Jérémie Gallen, un psychologue qui vient de sortir le livre « La Psychologie des Méchants ». Très grand fan de cinéma depuis sa tendre jeunesse, il explique qu’il a écrit ce livre de « façon très naturelle. Quand j’étais étudiant, pour assimiler toutes les psychopathologies qu’il y avait à apprendre, j’avais par habitude de repérer des cas cliniques de cinéma dans les films de mon enfance. »

 

Hannibal, le Joker, Thanos, Dark Vador...

À l’image de sa chaîne YouTube, Jérémie Gallen a voulu emprunter un ton assez décalé et humoristique afin d’intéresser le plus grand nombre, tout en restant « le plus précis et sérieux possible en ce qui concerne la psychopathologie ». C’est pourquoi son livre est avant tout à destination du grand public. On pourra donc retrouver dans son livre Hannibal Lecter (Le Silence des Agneaux), Dark Vador, Thanos (Avengers), le Joker, Bruce (le requin des Dents de la Mer), T-1000 (Terminator 2), Alien, Catherine Tramell (Basic Instinct), ou le professeur de batterie dans Whiplash, « un cas d’école de pervers narcissique », selon Jérémie Gallen.

Même si cela ne plait pas à sa femme au quotidien, ce dernier a souvent l’habitude de prendre des notes lorsqu’il regarde un film. Il revient justement sur la méthode qu’il a utilisée pour concevoir « La Psychologie des Méchants » : « je trouve un fil narratif pour que ça tienne la route, je respecte la chronologie du personnage avec sa propre histoire. Puis j’essaye de donner des points d’entrée sur le plan psychopathologique. Et je finis chaque analyse de personnage par la façon dont, personnellement, j’aurais cherché à l’accompagner, quels outils j’aurais mis en place, quel style de psychothérapie aurait été le plus pertinent. Et enfin, parfois, je dis que je n’aurais pas pu suivre tel ou tel patient, en expliquant les raisons. Car on ne peut pas travailler avec tout le monde, lorsqu’on est psychologue. »

 

Joker(s)

Le personnage pour lequel il a pris le plus de plaisir semble être le Joker, ou plutôt les Jokers, puisque Jérémie Gallen s’est concentré sur les personnages du Dark Knight de Christophe Nolan, et du Joker de Todd Phillips : « deux chefs-d’œuvre, deux personnages absolument éblouissants. Car ce sont aussi deux profils psychologiques différents. L’un ne peut pas devenir l’autre. Celui de Todd Phillips a une psychopathologie propre, et celle du Joker de Nolan en a une autre. J’ai trouvé ça très intéressant de comparer les deux. » Pour le personnage incarné par Joaquin Phoenix, l’auteur explique qu’on a « beaucoup d’affection pour lui. Ce qui est très intéressant chez un vrai méchant, c’est qu’on finit toujours par l’aimer. »

Le psychologue s’est également fait plaisir en analysant l’exemple de Dark Vador, figure majeure de la saga Star Wars souffrant d’un « trouble de la personnalité borderline, il est aussi très intéressant car c’est un cas d’école. Il a des sautes d’humeur, des difficultés à gérer les frustrations, une très grande colère, et un clivage entre un moi qui se voudrait être parfait et la difficulté à faire face à la réalité. Car nous sommes des êtres ambivalents avec un côté obscure, ça ne peut pas être plus clair. » 

Enfin, après avoir vu et revu tous ses films préférés, Jérémie Gallen semble être parvenu à formuler cette conclusion : « souvent, quand le cinéma essaye de traiter la psychologie, la psychiatrie ou la folie de façon ciblée, il se trompe, comme dans Split et ses clichés sur les troubles de la personnalité dissociée. Mais c’est toujours quand l’auteur essaye d’écrire sur les personnages les plus humains possibles que là, ils arrivent à créer quelque chose qui tient parfaitement la route, comme Whiplash. »